L'enfer
Par Kozlika le vendredi 23 septembre 2005, 06:43 - Lien permanent
Eolas, Veuve Tarquine, Ricou, Xave, Nonal et bien d'autres ont évoqué la situation dramatique du petit Eduardo, 9 ans, dont les parents sont menacés de reconduite à la frontière. Les parents. Oui, parce qu'Eduardo, lui, peut rester en France, confié à la DDASS. Ses parents ont le choix. La question de Nonal fait écho à celle qui me hante depuis la lecture du billet d'Eolas :
Moi, ce soir, je pense aux parents d'Eduardo. Alors, messieurs-dames, qu'est-ce que vous allez faire ? L'emmener avec vous dans ce pays qu'il ne connaît pas, où les gens s'entretuent au coin des rues, où les mômes de son âge connaissent déjà la fureur et la mort ? Ou bien le laisser à la DDASS ?
Que ferais-je ? Que ferais-je ? Choisir entre la peste ou le choléra, et crever de douleur et de rage, quoi qu'il arrive...
J'y pense sans cesse, à cet enfer que ces parents doivent vivre, à cette violence extrême qui leur est faite. Au-delà de la politique générale de reconduite à la frontière à tour de bras, des policiers qui doivent « faire du chiffre », au-delà de la politique sécuritaire tous azimuts, du second tour de rêve qui nous pend au nez aux prochaines présidentielles, je songe à ce qu'ils doivent être en train de traverser.
Je ne connais qu'un mot qui décrive ce que les lois du pays des droits de l'homme sont en train de leur faire : torture.
Commentaires
Le pays des droits de l'homme a aussi des lois (bonnes ou mauvaises ...). C'est une chose a laquelle les parents d'Eduardo auraient du réfléchir il y a 9 ans non ? AVANT ... Ça s'appelle la responsabilité ...
PS: Avant de me faire laminer je précise que je suis contre ce qu'il ce passe maintenant évidement, mais malheureusement c'est un peu tard pour tout le monde ...
Au passage, notre République de Liberté, Egalité et Fraternité bafoue allègrement ça.
J'ai de la famille qui a vécu en Colombie. Da Bourz, excuse-moi, mais je trouve ton commentaire éminemment stupide, et je me retiens très fort pour ne pas laisser de gros mots sur le site de la Fée.
S'il se passait ici seulement le dixième du quotidien à Bogota, je prendrais mes enfants avec moi pour essayer de leur trouver un environnement moins sauvage. Je ne crois pas qu'on me laisserait le loisir de "réfléchir" sur les conséquences légales d'une immigration clandestine, mais je le ferais quand même.
Lorsque je parle du cas d'Eduardo et de personnes sans papier à mes collègues, j'observe en général deux camps opposés. Et le côté droit du débat fini par dire un truc du genre : ah oui,..., mais c'est normal,... ce sont des gens qui utilisent les enfants comme un moyen de régularisation dans notre pays... etc....
Ce qui partage les deux camps n'est pas le fait d'accepter ou refuser cette situation, c'est un seul mot : notre. Notre pays. Tout le reste en découle. Mon fils est en plein dedans en ce moment. Quand il a un jouet en main il dit : "A moi!". Mais il a deux ans. Toutes ces personnes essaient se conserver un petit confort, s'accrochent à quelques m² urbains hors de prix et ne connaissent pas le mot partage.
Pas très d'accord. ;-) Le problème est que la loi existe, bonne ou mauvaise, et de savoir si l'on doit l'appliquer ou non. Ne plus appliquer les lois ne me parait juste pas très raisonnable. Maintenant, peut etre faut-il la changer, c'est une autre histoire. Je suis favorable à l'esprit terre d'accueil, tel qu'il était pratiqué en Angletterre jusqu'a il n'y a pas très longtemps. Ce n'est pas une histoire de partage, cette affaire nous met plutot le nez dans la caca de nos lois mal foutues ... ou non.
Ba Bourz : Les lois ça se change, ça se combat et si nécessaire, ça se transgresse. Et là, c'est nécessaire. Plus sérieusement, que peut-on faire ? Pétitionner (encore ?), manifester, écrire, bloguer ?
C'est très joli de se draper dans le code pénal, mais quand Sarkozy décide de renoncer, pour des raisons médiatiques, à faire expulser Guy Effeye (ce dont je me réjouis), il montre bien quel cas il fait de la loi. Dès lors, pourquoi celui-ci et pas celui-là ?
Quand une nation commence à appliquer ses lois de cette façon-là, au mérite, à la tronche, ou au calcul électoraliste, il y a un sacré problème, je trouve.
Mon commentaire ci-dessus s'adressait à Da Bourz, of course.
Post-it > "Pétitionner (encore ?), manifester, écrire, bloguer ?", sûrement, mais déjà faire tourner le billet de Maître Eolas.
La loi, d'accord ! Mais elle disait quoi il y a 9 ans la loi. Et puis, est-ce que les Colombiens la connaissent la loi française ? La seule chose qu'ils savent, pour la plupart, c'est que la France, c'est le pays des droits de l'homme, c'est l'espoir pour les enfants, pour leurs enfants d'avoir peut-être, un jour, une vie meilleure. Moi, si j'étais à leur place, pour que mes filles survivent, ne connaissent pas la galère, la loi, à condition de la connaître, je ne sais pas si j'en tiendrais compte (sachant qu'en temps normal, je suis très scrupuleuse la dessus). et parfois, la loi est injuste, et parfois la loi est mauvaise. La peine de mort aussi, a un moment, c'était la loi. Ça ne m'a pas empêcher d'être compte et de me battre pour qu'elle soit abolie.
Pascal de Finis Africae a fait une remarque très juste sur la politique de Sarkozy dont la famille a profité de l'accueil de la France vis-à-vis des étrangers qui avaient des difficultés. Si à l'époque on avait appliqué les règles qu'il impose, il n'y aurait pas de Sarkozy en France maintenant. Nous savons tous que quand, sur un cas, on arrive à mobiliser du monde, a faire bouger la presse et les élus locaux, la loi ne s'applique plus. Quand j'ai défendu la petite Tchétchène, il y a un peu plus d'un an, nous avons réussi à mobiliser les gens, à interpeler le gouvernement. en quatre mois de temps, non seulement elle et sa famille ont eu l'autorisation de rester sur le territoire français, mais en plus ils ont reçu le statut de réfugiés politiques : quatre mois !
Ce qui me fait hurler, moi, c'est quand la police arrête les enfants dans les écoles (ça se produit de plus en plus), pour être sure de les embarquer avec les parents. C'est quand on embarque des femmes enceintes en les trainant pas les pieds.
Et c'est les gens qui disent "Ils utilisent les enfants !" Pauvres c… Non, ils se battent pour sauver leurs enfants. Bon Koz, j'arrête de squatter, je vais faire une note chez moi.
Si on en croit ce commentaire et celui-ci laissés par Thot, toute la procédure ressemble à de la gesticulation aberrante, voire abjecte :
Les policiers auront fait leur chiffre, et Sarko pourra expliquer qu'il a pris les choses en main et doublé les résultats de ses hommes, les juges ne seront pas accusés d'être laxistes, et les familles seront restées en France, leurs rêves juste un peu flétris, le gamin traumatisé (le refus d'embarquer, c'est pas de la rigolade...), et ayant appris un peu plus à avoir peur... Beau bilan.
Quoi qu'il en soit, je suis d'accord avec Anne.
Bien, bien, tout le monde ayant fort bien répondu à DaBourz, je ne ferai qu'ajouter ma voix à la vôtre, vous gardez bien la boutique ;-)
Maintenant, on fait quoi ? Je suis quant à moi persuadée que les amis et professeurs du jeune Guy Effeye ont réussi à faire suffisamment de bruit pour qu'un règlement spécifique soit trouvé. Je ne crois pas qu'on puisse changer les lois d'ici l'expulsion des parents d'Eduardo, mais leur faire obtenir une « grâce » ou je ne sais quoi, on peut essayer non ?
Faire passer le billet d'Eolas déjà, demander à nos blogocollègues de relayer... D'autres idées ?
Koz : Ce ne sera pas hélas suffisant. Il faudrait pouvoir émouvoir la presse (même si c'est dur et pour cela faire des actions qui leur semble suffisemment éclatante pour qu'il s'intéresse). Faire un comité de presse, essayer d'avoir des élus locaux créer un réseau de vigilance autour de la famille, faire un pétition, la faire signer le plus largement possible, l'envoyer au élus de Paris, au minsitère de l'Intérieur, à la Préfecture de police. Montrer directement à ces gens-là qu'il y a des gens qui soutiennent Eduardo et sa famille. Le Blog n'est pas encore reconnu par ces gens-là. Mais les gens qui se déplacent, qui signent, sui font un comité de vigilance… ça ça a une chance… Est-ce que les parents d'élèces de l'école d'Eduardo sont au courant, est-ce qu'ils se mobilisent; c'est un bon relais quand ça passe par les parents, ça marche assez bien.
Il faudrait que je fasse un mémo sur l'art et la manière de s'organiser. Je vais essayer demain.
En attendant, qui peut rédiger un comuniquer de presse, je m'engage à le faire passer à une maximum de journaux demain. Qui peut se renseginer sur l'école ou est eduardo, lundi je peux essayer d'alerter la FCPE et les lancer sur l'histoire.
Les communiqués de presse, c'est mon truc, je sais faire. Mais là, vous oubliez un élément essentiel : nous n'avons aucun matériau. On ne monte pas un comité de vigilance sur un prénom et un âge... Si encore nous connaissions le nom d'Eduardo, son adresse, les coordonnées de l'avocat de la famille... Là, je ne dis pas. Mais en l'état...
Par ailleurs, comme dit Eolas dans les commentaires de son billet, Eduardo (dont l'histoire est bien réelle, semble-t-il) est un symbole qu'il a pris pour évoquer la situation de dizaines d'enfants qui sont tous dans la même situation, et menacés pareillement.
Pourquoi défendre celui-ci plutôt que ceux-là ?
A mon avis (et il n'est pas défaitiste), la chose la plus importante à faire, c'est de faire tourner l'info, de relayer, d'en parler autour de soi le plus possible. Que chacun sache à quoi s'en tenir. Quand ce ministre de l'intérieur issu de l'immigration déclare qu'il va "reconduire à la frontière", ce n'est pas une formule de courtoisie... Juste l'expression d'une politique qui bafoue à loisir les principes d'humanité, de fraternité, et de droits de l'enfant.
Nonal a raison.
Pour ceux qui veulent rejoindre un mouvement qui défend des enfants scolarisés sans papiers et qui milite pour empêcher activement leur expulsion, allez voir éducation sans frontières qui lance actuellement une pétition.
Samantdi > merci pour ce lien ! Koz > Hé ! C'est ma phrase préférée ! ;-)
C'est vrai des enfants comme Eduardo, il y en a plein. Pourquoi celui-ci plutôt qu'un autre ? Parce qu'il faut bien commencer un jour. Et qu'il vaut mieux celui-ci que pas du tout. A l'école de mes enfants, je prends les cas comme ils se présentent, dans leur urgence. Evidemment, il y a aussi des cas dans les écoles d'à côté. Alors pourquoi ceux-ci plutôt que d'autres ? Parce que si chacun prend un cas sous sons aile, celui qu'il connaît déjà, ça sera toujours une brêche dans le triomphe de l'imbécile de la place Beauvau. On est efficace quand on s'occupe d'une personne à la fois. Pas de principe. Le temps que la pétition se fasse, que les blogs fassent tourner l'info dans leur rseau, Eduardo, et les autres, ont le temps de partir.
Akynou > je suis d'accord avec tes arguments, mais nous ne "connaissons" pas ce cas, pour reprendre tes termes. Nous n'en savons que ce qu'Eolas en dit, c'est à dire pas grand chose. On ne monte pas des pétitions ni des comités de soutien sur un cas anonyme. Il faudrait pouvoir contacter en préalable l'avocat qui s'occupe de cette histoire.
Il y a quelque chose qui me gêne dans cette histoire : sa particularité. Certes, il est un excellent exemple de ce qui peut se faire de pire en matière de politique sur l'immigration, concernant un enfant, dans une famille intégrée, on ne peut rêver mieux comme argument, mais dans un même temps, c'est limiter son action. Il faut le sauver, c'est sûr, tout comme il faut sauver tout ceux qui le demandent, tous ceux qui sont Français mais ne sont pas reconnus ainsi, et peu importe qu'ils aient 7 ans ou 34, qu'ils viennent de la Colombie ou du Cameroun (ou de Hongrie...) ; le fait de se consacrer à un seul cas particulier va, je pense, malheureusement demander beaucoup d'énergie pour ce qui ne profitera pas aux autres, car on l'a bien vu depuis tout ce temps que les reconduites à la frontière existent, on a beau en sauver quelques uns de temps en temps, rien n'a évolué, et même pire, on a maintenant des quotas qui ont aggravé la situation, le comble de l'horreur.
Alors que faire ? La solution est simple dans sa formulation, extrêmement compliquée dans son application, mais c'est la seule et unique qui vaille. Au lieu d'essayer de sensibiliser, de jouer sur les passions volatiles que sont les émotions de compassion, il faut au contraire amener à la réflexion. Réfléchir est la seule voie salvatrice. Penchons-nous sur le problème. Pourquoi avons-nous cette situation actuelle ? Parce que notre système politique est moisi de l'intérieur, parce qu'il conduit au pouvoir des gens que l'on aurait dû conduire à l'échafaud. Certes, il prendra trop de temps de mettre en place une vraie République, mais l'on peut s'attaquer tout de suite à l'origine même de la situation : les citoyens, les électeurs, ceux qui décident, via cette dictature du peuple qu'est la démocratie, les lois qui seront votées, les mesures qui seront prises. Il est temps de ne plus se cacher la vérité : le problème, ce sont les électeurs, personne d'autres ; pourquoi ? par manque de réflexion, tout simplement. Je suis d'une famille qui compte énormément d'immigrés, depuis 2 ou 3 générations seulement, pourtant le nombre d'électeurs de droite y est plus qu'intolérable, et la non-acceptation des immigrés y fait peur, même si à la base il ne s'agit pas de racisme "pur". L'Humanisme a un coût très élevé, celui de la réflexion, ce n'est pas donné à tout le monde, et il ne faut pas compter sur un gouvernement de gens très riches et égoïstes, où le ministre de l'éducation en personne a un niveau scolaire pitoyable (mais est le fils d'un comte, voyez-vous), pour relever le niveau et sortir la populasse (au sens bien péjoratif du terme) de son ignorance. Je lisais récemment Phersu faire un décompte atterrant des évolution conservateurs vs progressistes au pouvoir au fil du temps, et le peuple est égoïste par nature, il veut garder ses acquis, et pour cela il est prêt à se fourvoyer s'il le faut ; il sera dur de le faire évoluer, Confucius préférait tout simplement de son temps quitter un pays non vertueux, et pourtant c'était un homme extrêmement sage, il y a plus de 2700 ans ; Socrate a été condamné par la société démocratique d'Athène qu'il essayait de faire évoluer ; tant d'autres exemples où les penseurs n'ont réussi à empêcher ce massacre de la bêtise. Je pense que le meilleur moyen d'évangéliser, outre l'école - - à long terme, mais cela est déjà trop tard pour trop de monde, les électeurs justement - -, reste la télévision, ce média le plus puissant du 4ème pouvoir, qui passe des âneries lobotomisatrices à heures de grande écoute, et les réflexions intelligentes à des heures hallucinantes. S'il y a des journalistes qui passent par ici, ils devraient se rendre compte que ce sont eux qui ont un immense pouvoir. Celui-là même qu'ils ont utilisé pour dénoncer un "sentiment d'insécurité" qu'ils ont eux-même créé, et qui a mené à l'élection de notre président et de notre gouvernement actuel. En attendant, pour ma part, j'essaie de convertir le plus de monde possible à la bonne pensée rationnelle et réfléchie, faute de pouvoir le faire avec la vertu elle-même, et ce n'est pas gagné...
En définitive, sur le court terme, il faut agir maintenant, une pétition ou autre, pourquoi pas ? Sauver une vie, c'est sauver toute l'humanité, ou quelque chose du genre... Mais le problème n'est pas là en réalité : il est sur le long terme, il est au plus profond de la pensée biaisée de chaque être. C'est cela qu'il faut combattre. L'ignorance et la bêtise sont les seuls véritables ennemis.
Merci pour votre attention ;) (et désolé d'être aussi long ; le prévisualisation m'a aussi montré que le wiki, ça fait des choses bizarres parfois :s)