« Pourquoi suis-je attiré comme un aimant par ton blog ?
Tous les jours je me dis il ne faut pas lire ce mec il te déprime encore plus.
Ne le prend pas mal mais on peut pas dire que tu sois un gai luron et pourtant j'y reviens. Certainement par voyeurisme en se disant Non ...*** t'es pas tout seul.
Ça peut paraître maso mais ça vous ramène vers l'humain on a toujours tendance à se croire exceptionnel en tout, même le pire.
Et bien sur comme on est des gens très intelligents et modestes, on crie partout qu'il n'y a pas plus nul à chier que soi.
Ce que je trouve de gênant dans ce type de communication c'est que parmi les personnes qui répondent à tes commentaires, tu en connais certain(e)s. Ce qui leur donne peut être le droit de répondre à l’exposition de tes problèmes les plus personnels.
Mais les autres, les anonymes, ils font quoi ?
Parfois eux aussi osent répondre tout en se rendant compte du ridicule de la situation.
Cela donne l'impression d'être comme ses gens qui parlent tout seul dans la rue et quand on en arrive là on est pas loin de l'internement. »

Jean Rostand disait : "La folie, nous enseignent les psychiatres, est souvent liée à l'incapacité d'aimer... Essayer d'être le moins fou qu'il nous sera possible."

Il m'a fallu plusieurs jours pour me rendre compte que cet e-mail m'a beaucoup plus touché que ce que je pensais de prime abord...

J'ai été tenté de répondre dans un premier temps par une grande envolée sur la pudeur ou l'impudeur des blogs, sur l'aspect gênant ou gratifiant de se savoir lu, sur l'idée que le fait d'être lu par des personnes que je connais, qui me connaissent, pouvait générer une forme d'auto-censure...

La seule censure véritable que je m'impose tient à ma vie ou mon absence de vie sexuelle. Non pas que j'ai quelque chose de honteux à cacher mais parce que... Parce que quoi en fait ? Question d'éducation peut être... Ou plutôt - j'ai plaisir à le croire - de respect pour ceux qui au détour de leurs cyber-pérégrinations vont me lire.

Certains blogs (je pense à Paumé par exemple) sont souvent à l'opposé de ce que je me sens capable d'écrire, ou plutôt de publier. Et je n'aurai pas l'indécence de le juger, de le critiquer, moi qui ai également arpenté les jardins du Louvre ou d'autres lieux tout aussi glauques. Je ne supporte d'ailleurs pas les lecteus de son blog qui le lisent pour mieux le critiquer ou le juger avec dégoût ou dédain. Pour moi Paumé est respectable.

J'ai trouvé, quelques minutes avant d'écrire, cette note sur le blog d'un nouveau venu dans mes lectures : PPPlog. Rien à ajouter sur ce qu'il écrit à propos de la pudeur ou de l'impudeur d'un blog...

Je ne crois pas faire injure à certains de mes lecteurs, que je connais pour les avoir rencontrés (et c'est une vraie joie que d'avoir fait leur connaissance) que d'écrire aujourd'hui qu'ils ne me connaissent pas vraiment. C'est évident, c'est normal, c'est logique... Question de génération. Parce que ces rencontres se sont faites dans le mileu des pédés-internautes. Une seule personne parmi celles qui fréquentent ce blog peut prétendre me connaître, et c'est une femme. Dont j'ai fait la connaissance en vrai, et non pas suite à des échanges informatisés.

''C'est pourquoi je ne fais pas vraiment de différence entre ceux que j'ai rencontrés et les anonymes. Chacun peut mettre le filtre qu'il veut en me lisant.''

Chacun peut choisir le Garfieldd qu'il trouve intéressant ou attractif (je n'ai pas voulu écrire attirant!). Ce sont les aventures de Marcel le gentil intendant qui attirent le plus de commentaires. Et sans doute sont-elles aussi la motivation principale du retour sur mon blog. On vient voir ce qu'il a encore bien pu inventer. On vient assister et participer à la curée. On vient au spectacle...

Il n'y a sinon pas matière à revenir je pense, pour lire les pitoyables aventures d'un plus que quadragénaire pleurnichard.

Il m'a fallu plusieurs jours pour me rendre compte que cet e-mail m'a beaucoup plus touché que ce que je pensais de prime abord... parce qu'il dit que j'ai un pouvoir sur ceux qui me lisent...

Restons lucide, le pouvoir est limité. Mais si je suis celui qui "te déprime encore plus"... ai-je tort de penser que c'est parce que ce que j'expose ici sonne vrai ? C'est quelqu'un d'anonyme (pour reprendre la typologie suggérée dans l'e-mail) quelqu'un donc qui ne peut pas - via un quelconque filtre affectif - prendre part à ma (ou mes) peine(s)...

Et si ce que j'ecris sonne vrai, c'est sans doute que les idées ou les sentiments sont vrais.

Je n'ai pas le sentiment d'être quelqu'un d'exceptionnel, ou d'atypique, ni en bien ni en mal. Je n'ai pas le sentiment d'avoir a priori une vie ni plus ni moins passionnante ou remarquable que les autres... Je n'ai pas le sentiment d'être particulièrement à plaindre.

Je parle de ma vie, de mes goûts musicaux, de mon boulot, de mes espoirs souvent déçus. Rien que de très banal. Ajoutez y le fait que je suis pédé de plus de 40ans...

Peut-être que le mélange devient de lui-même générateur d'images négatives et stressantes... Un vieux pédé, seul avec ses disques, existant au travers des mots chantés par les autres (vous avez remarqué que j'ai, depuis quelques temps déjà, pris le parti de commencer mes notes par un extrait de chanson?), grimaçant à cause d'un mal au dos persistant... peut-être même suis-je en train de rêver que je caresse un chat qui ronronne égoistement sur mes genoux...

Vision déprimante c'est vrai. Mais seulement pour moi parce que (le chat mis à part), c'est ma vie.

Pas la vôtre.

Pas même le reflet de la vôtre.

Et qu'il ne tient, ou qu'il ne tenait qu'à moi de décider qu'il en soit autrement.

Pas d'identification hâtive ou déplacée... Comme on dit quand on est gamin devant la télé, et que son héros favori meurt, Ce n'est qu'un film !

Ce n'est qu'un film. C'est MON film...


Afin que chacun puisse se faire une idée de la teneur hautement pornographique du blog de Garfieldd, proviseur blogueur révoqué[1], j'ai choisi de publier chaque jour ou presque pendant quelque temps l'un des billets du blog, qu'il a fermé le 19 octobre 2005 en apprenant qu'il était suspendu. Ce billet et tous les autres sont accessibles via webarchives.org, une institution sans but lucratif qui archive à fins documentaires et historiques des sites web même après leur fermeture. Vous pouvez également lire ici le blog qu'il tenait précédemment.

Pour d'autres billets évoquant le sujet, cette pelote de liens, chez Laurent Gloaguen (plus de 250 articles recensés à cette heure). Une pétition « Bienveillance pour Garfieldd » a également été lancée par des parents d'élèves ou anciens élèves de Garfieldd. Elle recueille à l'heure où je publie ce billet 2284 signatures. N'hésitez pas à y ajouter la vôtre !

Notes

[1] Cette décision a été suspendue par Gilles de Robien hier, 20 janvier 2006 mais les termes qui concluent le communiqué laissent entendre qu'une sanction sera tout de même prise, c'est pourquoi je continue de publier ces si p0rn0graphiques extraits..