Récital Dessay-Villazon : c'est pas encore ce coup-là que je vais arrêter d'être fan (1)
Par Kozlika le mardi 2 mai 2006, 19:37 - Lien permanent
Ella, elle l'a
Ce je ne sais quoi
Que d'autres n'ont pas
Qui nous met dans un drôle d'état
Ella, elle l'a
Ella, elle l'a
Cette drôle de voix
Cette drôle de joie
Ce don du ciel
Qui la rend belle
Ella, elle l'a
Ella, elle l'a
(France Gall, « Ella, elle l'a »)
Qu'Ella la grande me pardonne de voler un extrait de l'hommage que lui rend France Gall pour introduire ce billet façon Garfieldd, le complice qui partagea mon bonheur en ce dimanche soir au Théâtre des Champs-Elysées.
J'hésiterais à employer des qualificatifs tels que « grandiose » ou « exceptionnel » si d'autres que moi, moins inconditionnels, voire sceptiques de longue date, n'avaient eux-mêmes couvert d'éloges la prestation des deux chanteurs, et notamment de la soprano, merveilleuse de bout en bout, tant dans son registre familier de l'opéra français, que plus nouveau de la Lucia italienne, voire inédit avec La Traviata.
Eux...
Rolando Villazon déclarait lors d'une interview que la première fois qu'il avait entendu Natalie Dessay, sa première réaction avait été « Wouahhhh ! » et la deuxième « Je veux chanter avec elle un jour. » Voilà qui fut fait, et de belle manière. Si le ténor mexicain m'a moins impressionnée que la chanteuse, je crois son avenir très prometteur. Il semble posséder toutes les qualités requises pour faire une longue et belle carrière : les veloutés nécessaires à la fin du duo de Roméo et Juliette, la fermeté qui sied à l'Alfredo de la Traviata et le sens du théâtre qui, allié à celui de Natalie Dessay, nous fit bien souvent oublier que nous assistions à un « simple » récital.
Ne négligeons pas également un physique appréciable et un incontestable talent pour séduire le public façon crooner latino, ressource dont il sut user sans abuser lors de ses moins-bien dimanche. Crooner mais pas lourdingue, il apporte à son chant un éventail de nuances sans en faire des tonnes, péché mignon dans lequel tombent facilement ces hâbleurs de blogueurs ténors à l'ego surdimensionné dès que les feux de la rampe se tournent vers eux.
L'orchestre de Radio-France, sous la ferme houlette de son directeur Myung-Whun Chung apporta sa pierre à la perfection de la soirée, l'ouvrant par une... ouverture (oui, bon...) de La Forza del Destino très bien maîtrisée pour une parfaite mise en condition, l'accompagnement des chanteurs fut impeccable, présent mais pas envahissant et ne couvrant pas les voix. Cela dit, Dessay ni Villazon n'ont vraiment besoin qu'on les ménage, l'un comme l'autre possédant une voix puissante (Dessay), voire très puissante (Villazon) et une bonne (Villazon), voire très bonne (Dessay) projection.
... et Elle
Ah, Elle. Rhalala lala. Vous ne pouvez pas savoir ce que vous avez raté. Ah si en fait vous pourrez en avoir une petite idée en écoutant la retransmission du concert le 8 mai sur à 20 h, sur France-Musique. Une Natalie Dessay dans un grand, un très très grand jour. Attention, vous allez avoir droit à la revue de détails. Pour le revivre et me souvenir et spécialement pour Juju qui aurait tant aimé pouvoir venir.
De la tenue
Commençons par les futilités. D'ordinaire Natalie Dessay a des robes assez moches et moi ne partageons pas les mêmes goûts vestimentaires. Elle revêtait pourtant en cette soirée de liesse musicale une robe couleur bronze dont la forme et la matière évoquaient un ma foi fort joli déshabillé à fines bretelles, fendu tout le long de sa jambe gauche et accompagné d'une étole dans les mêmes tons. Abandonné aussi le chignon banane aux mèches folles, au profit d'une chevelure revenue à son brun naturel (ouf !) nouée en demi-queue à l'aide d'une jolie barrette miel. (Si quelqu'un dégotte une photo...)
De l'audace
C'est dans cette tenue qu'elle apparaît sur la scène pour son entrée dans le duo de La Traviata. Je devine l'état de tension dans lequel elle devait se trouver à ce moment-là. D'abord, elle a toujours un trac de dingue les premières minutes (ça s'est d'ailleurs un tout petit peu entendu dans ce duo, le seul air où elle a été un poil, un tout petit quart de poil, en retrait, crispée). Mais surtout, surtout, c'était La Traviata, un rôle qu'elle n'a jusqu'ici jamais chanté (en public du moins), et que beaucoup ne pensaient pas à sa portée, en raison de sa tessiture. On murmurait qu'elle était totalement frapadingue de viser Violetta, on prédisait la chute magistrale, pathétique, au mieux acceptable avec un public bienveillant. Or après le duo le programme annonçait le solo de Violetta : « È strano », peut-être le plus célèbre des airs pour soprano. Soprano lyrique de préférence, capable pour certains passages (et à certains goûts) de tirer vers le dramatique. Et Natalie Dessay est (était ?) soprano léger...
Flamboyante. Plus que crédible, sa Violetta multiplie les facettes, tour à tour dubitative, rêveuse, désabusée, résolue. La voix est sûre et solide. L'air est généralement scindé en deux pistes, « È strano » et « Folie ! » et après l'aigü puissant qui ponctue la fin du premier une partie du public, déjà plus que conquise, pense qu'elle a accompli son but et qu'elle va s'en tenir là. Que nenni, interrompant les premiers cris d'extase, elle enchaîne sur « Folie ! », et j'ai cru percevoir qu'avoir passé la première manche avec brio la libère plus encore pour le deuxième, qu'elle chante en conquérante, ce qui colle parfaitement au texte.
Ceux qui connaissaient l'enjeu comme ceux qui n'en mesuraient pas la portée saluent la fin de l'air en un tonnerre d'applaudissements et de cris, et je ne suis pas la dernière à me mêler aux uns et aux autres ! Ses yeux brillent d'un bonheur qui fait plaisir à voir.
Douce
Pfiou, la magie créée par ce premier solo ne va pas s'estomper jusqu'à la dernière note du récital. Les deux chanteurs poursuivent avec l'émouvant duo de Lucia di Lammermoor, lorsque les deux jeunes gens viennent de se promettre amour et fidélité avant qu'Edgardo ne parte pour la France. Notre Rolando a des yeux de velours et la voix assortie. Natalie Dessay est une superbe jeune amoureuse inquiète et triste de se séparer de son fiancé. On l'entendra en entier dans ce rôle en septembre à l'Opéra Bastille. Il me tarde !
Entracte (à suivre plus tard dans la soirée)
Commentaires
Ralalalala. Toi évidemment on n'est pas prêts à te croire, mais j'ai un pote pas fan d'opéra qui a été retourné comme une crêpe (par le duo Roméo/ Juliette, entre autres), alors.....ça pourrait bien être vrai ce que tu racontes.
Je suis un peu comme Zvezdo, je sais à quel point tu l'adores... mais ce coup-ci, je te fais confiance, j'étais tout excité en lisant ta note, j'attends d'ailleurs la suite avec impatience. Natalie en Violetta... là je suis prêt à casser ma tirelire encore pire que pour Lucia :)))))))
J'aurai manqué ça... le duo Romeo/Juliette est une des plus émouvantes choses qui existent. Alors avec Dessay en Juliette !
Ca y est, je suis debout sur les sièges en train d'applaudir.
Koz tu as une chance folle d'avoir assisté à ce concert !!wouaahhh!! Et oui, vivement Septembre !!
C'est le récital auquel je n'ai pas pu aller le 13 avril dernier à Toulouse. Déjà, en ce temps, ça me faisait GRRRR mais avec ce que tu en dis c'est encore pire.
-- Xj
Tiens, j'aurais donc un point commun avec ce
RonaldoRolando dont j'avais pris en la recevant sans savoir pourquoi sur ma messagerie, la pub pour une daube (1) (à condition toutefois de remplacer chanter par écrire et Nathalie Dessay par, disons, Virginia Woolf (genre))(1) à ma décharge, faut voir la photo façon crooner parodique, hein. et puis voilà, moi l'Opéra, sortie de Verdi et de Roberto ... ;-) je suis capable de prendre La Callas pour une allemande (cf. les commentaires des écoutes comparatives de par ici pendant l'hiver)
pas du tout d'accord. Desay a massacré l'air de la traviata, elle chante trop haut (ou alors je n'aime pas du tout sa voix), et elle en fait des tonnes quand elle chante: pire qu'une débutante... moi je ne retourne pas la voir. En revanche, Villazon, meilleur qu'il y a un mois.
Les applaudissements de la fin ici.
Bonjour et bienvenue Rodrigo.
A dire vrai je ne suis guère étonnée de ton désappointement quant à la prestation de Natalie Dessay. Lors de notre conversation off à l'interview commune d'Europe 1 j'en avais retiré le sentiment que tu aimais les voix corsées et trapues, loin, bien loin de Natalie Dessay donc ! Je pense même que tu dois être des tenants des sopranos franchement dramatiques pour ce rôle. Qui est ta Traviata favorite ?
De même, tu m'as dit préférer les récitals aux opéras (et j'avoue que ça me laisse pantoise de préférer les performances individuelles aux spectacles complets), ce qui entre à mon sens en grande part dans ton impression de surjeu de la part de la chanteuse ?
Je suis du coup beaucoup plus étonnée de ton impression très favorable de Rolando Villazon. Sur le point du surjeu par exemple, si du moins on le mesure à l'aune de ton opinion sur Dessay, le moins qu'on puisse dire est qu'il n'est pas en reste. Techniquement il est encore très en-deça de sa partenaire, même s'il est vrai qu'il était en bien meilleure forme dimanche que le mois dernier, et compense justement (et c'est tant mieux) par un grand engagement dans l'interprétation. Tu le compares non sans raison à Domingo, enfin disons dans sa lignée, il n'y est pas encore ! Or précisément si je respecte grandement l'énorme talent et la belle technique de Domingo, il n'est pas de mes favoris car je le trouve trop péremptoire (ne sais pas comment l'expliquer mieux), j'aime les voix plus rondes, plus chaleureuses (au premier rang desquelles Carlo Bergonzi, l'amour de ma vie) et c'est ce qui m'a manqué dans le chant de Villazon à ce récital.
Tu sais quoi ? On n'a pas les mêmes valeurs :-)
PS. Est-ce parce que tu estimes que Natalie a « massacré » La Traviata que tu massacres son nom de famille ? Il y a deux « s » à Dessay...
Eh bien si, j'ai raté et le concert, et la retransmission... vu que Natalie n'avait pas noté mes dates de vacances quand elle a programmé son récital... Ouinnnn........ Snif........ En tous cas, je viens juste de rentrer, et tous ces commentaires superlatifs ici et sur Opéra Giocoso me font tres plaisir, tant pour Dessay (tu sais combien je l'adore : c'est d'ailleurs elle qui fut à l'occasion de notre rencontre (tout d'abord) informatique), que pour Villazon, qui est aussi un artiste fort attachant (il a chanté à Lyon dand La Boheme, Traviata et Roméo et Juliette, et y a laissé d'excellents souvenirs).
ouı,natalıe dessay etaıs soprano leger...maıs,travıata est egale a 2 voır 3 soprano...elle le dıt elle meme,elle saıs que c'est la lımıte de ses moyens.son tımbre de soprano colorature luı permet d'ınterpretter lakme de delıbe,la fılle du regıment et meme lucıa de lammermoor...elle ınterprette deja parfaıtement sempre lıbera...maıs saura-t-elle toujour chantez vıoletta (un opera de plus de 4heures)avec plusıeur mı-bemlo de fın,et un contre sol aıgu de fın?