Sans contraintes, juste pour le plaisir et liquider un brouillon en souffrance...


« Bonjour et bienvenue à la Maison Troiternet, monsieur, que puis-je pour vous ?

– Eh bien, Octavine... C'est bien Octavine le nom que je lis sur votre badge ? Curieux prénom... Enfin bref, peu importe. Mademoiselle, je suis venu ici car j'aimerais rencontrer une personne responsable pour me plaindre de vos services. J'ai pris chez vous un contrat B.L.O.G. il y a quelque temps, mais le logiciel que vous m'avez fourni est complètement détraqué.

– Vous voulez un rendez-vous avec notre service technique peut-être ? M. Feuquine-Manuel pourrait vous recevoir, lundi par exemple, ou Mme Faque tout de suite si vous voulez, je crois que son rendez-vous de seize heures a été annulé.

– Non, non, ce n'est pas un problème d'utilisateur, c'est un bug, et en fait je veux voir le service contentieux. Tout de suite.

– Ecoutez, monsieur... monsieur ?

– Alain Cret, gérant de la Compagnie Immobilière de France.

– Ecoutez, monsieur Cret, si c'est un bug, c'est précisément le service technique qui sera le mieux à même de vous aider et je crois que...

– ... le contentieux, mademoiselle, le contentieux ! Je tiens certes à signaler ce bug mais je tiens surtout à être remboursé dans les délais les plus brefs avec rétroactivité depuis le début de mon contrat chez vous !

– Monsieur Cret, je ne comprends pas, cette prestation est gratuite et...

Rien n'est gratuit mademoiselle, absolument rien. Nous évaluerons avec vos supérieurs le moyen d'estimer tout cela. Je comprends tout à fait que ce ne soit pas de votre ressort, mais je ne vais pas non plus passer l'après-midi à bavarder avec vous. Indiquez-moi donc où se trouve le service contentieux et le nom de son responsable, nous gagnerons tous les deux un temps précieux.

– Eh bien... si vous voulez bien attendre une minute dans ce fauteuil, je vais prévenir M. Djondo de votre venue.

*  *  *

– Entrez, entrez, monsieur Cret, asseyez-vous et dites-moi quel est votre souci.

– C'est très simple, monsieur, vous allez tout de suite comprendre ce qui ne va pas. J'ai installé et configuré votre B.L.O.G. comme l'explique la notice point par point. De ce côté je suis sûr de n'avoir commis aucune erreur. En fait, il a fallu un certain temps pour que je comprenne ce qui se passait...

– ... Oui ? Un problème avec le téléchargement des images ? Du spam peut-être ?

– Non non, rien de tout ça, de cela je me serais accommodé. Voyez-vous je suis quelqu'un qu'on qualifie plutôt de doux et aimable et je n'aime pas avoir à entreprendre le genre de démarche qui me conduit jusqu'à vous, mais dans le fond, reconnaissez que j'aurais pu simplement clore le contrat sans rien vous dire au risque que vous perdiez d'autres clients. Il me semble qu'un juste dédommagement...

– ... Encore faudrait-il, monsieur Cret, que vous m'expliquiez...

– Certes. Où en étais-je ? Ah oui, tout s'est à peu près bien déroulé donc, et j'ai commencé à publier mes premiers billets. De petites choses dont je suis immodestement assez content : photos, textes d'invention, etc. Rien de personnel bien sûr, j'ai horreur des gens qui s'étalent en public. Bref, comme prévu, j'ai reçu de charmants commentaires laudatifs ; certains m'ont semblé correspondre tout à fait à la typologie de ce que je recherchais et j'ai commencé avec l'une des signataires une correspondance suivie et, comment dire... très proche, vous voyez ce que je veux dire ?

– Tout à fait, monsieur. Sans que cela constitue notre objectif premier, nous sommes toujours très heureux d'apprendre que certains clients...

– ... eh bien non, justement monsieur, c'est à cette occasion que j'ai découvert LE bug !

– Ah ?

– Oui, car voyez-vous, voulant pousser plus loin les limites du logiciel, j'ai proposé un rendez-vous à cette signataire, et elle a accepté !

– Eh bien ?

– Eh bien, j'étais prêt à m'enthousiasmer et vous faire une réclame d'enfer auprès de mes propres clients : que votre logiciel soit capable de produire un... enfin une... enfin ça ! Ça me semblait au-delà de mes espérances les plus folles, jamais je n'aurais imaginé pouvoir aller jusqu'à la troisième dimension !

– Je crains de ne pas vous suivre...

– Monsieur Djondo, le bug, le terrible bug, c'est que la personne que j'ai rencontrée était une vraie personne. Oui monsieur, une vraie femme, votre programme est manifestement truffé de virus ou je ne sais comment vous appelez ça, mais vous imaginez le dommage que pareille mésaventure a produit sur ma tranquillité !

– Décidément, je ne comprends pas...

– Vous voulez dire que vous faites semblant de ne pas comprendre : c'est pourtant simple. Votre programme met en relations de vraies personnes et non des simulations - encore moins des simulations 3D comme j'ai eu la folie de croire un moment que vous en seriez capables.

– Des simulations ?

– Oui oui, je ne sais pas comment vous appelez ça dans votre jargon mais vous voyez ce que je veux dire : des sous-programmes, des plugins, des avatars... enfin tout mais pas de vraies personnes bien sûr ! Du diable si j'ai envie de rencontrer l'une de ces créatures compliquées et récriminantes à longueur de journée, je n'ai pas signé ce contrat chez vous pour ça, vous vous en doutez bien ! La programmation de cette... personne avait pourtant l'air tout à fait bien les premiers temps, avant que je découvre le pot aux roses ! Je pense même que nous pourrions trouver un compromis sans passer par les procédures contentieuses si toutefois vous pouviez reprogrammer mon B.L.O.G. de façon à récupérer le profil virtuel de cette signataire. J'adorais ses lettres, je ne sais plus si je vous l'ai dit ? »

[...]


Devoirs de vacances. Je pars dimanche matin jusqu'aux alentours du 20 août. D'ici mon retour en civilisation adsl, vous rédigerez la suite et fin de ce récit ;-)