Octobre 1987, je suis étudiante. Bénéficiant d'un droit à la formation bien plus étendu qu'il ne l'est aujourd'hui pour les licenciés économiques, j'intègre la fac d'Aix-en-Provence, en première année de communication-linguistique.

C'est la première fois de ma vie que je mets les pieds dans une université. J'ai travaillé sitôt après le bac, par choix, parce que j'avais bien plus envie de gagner ma vie et voler de mes propres ailes que de poursuivre des études. Et puis des études de quoi d'ailleurs ? Tous mes camarades de classe s'arrachaient les cheveux sur cet épineux problème, peu d'entre eux ayant une idée bien déterminée de ce qu'ils voulaient faire. L'orientation s'effectuait alors sur des critères aussi déterminants que l'ambiance de la fac, la matière où ils avaient les meilleures notes ou le plus souvent ce que leurs parents leur conseillaient.

Rien ne me tentait vraiment. Et puis j'avais la piste de la correction qui me plaisait bien. C'est quelques années plus tard que le goût d'apprendre prit le pas sur le dégoût de la scolarité et je sautai sur l'occasion de ce licenciement pour m'inscrire en fac. Je fus l'une des meilleurs élèves et je ne crois pas que ce soit en raison de capacités supérieures à mes condisciples, mais j'étais plus mûre que ces gamins de dix-huit ans, je n'étais plus imprégnée du rapport prof/élève du lycée comme ils l'étaient eux, et j'étais là entièrement par choix personnel, dans cette filière précisément.

Ce fut le cas pour ces deux années comme pour les formations que j'ai pu suivre ultérieurement. Par chance j'ai pu disposer du luxe qu'elles n'eurent jamais représenté d'autre enjeu que mon enrichissement personnel (mmm intellectuel, l'enrichissement !), mais je pense en tout état de cause que les études qu'on fait adulte sont plus profitables qu'en sortant du lycée.

En comparaison des expériences que j'ai pu échanger avec d'autres « repreneurs » d'études, les parcours des jeunes après le bac m'apparaissent beaucoup plus erratiques. Grand nombre d'entre eux se rendent compte au cours de la première ou de la deuxième année de fac qu'ils se sont fourvoyés, ils sont également souvent dans une disposition d'esprit qui leur fait perdre de vue pourquoi ils sont là, à part pour pouvoir passer dans la classe/niveau supérieur.

Il existe je crois dans plusieurs pays la possibilité de prendre une sorte d'année sabbatique à l'issue des études secondaires sans compromettre ses choix d'orientation. C'est je trouve une bonne idée. Après s'être frottés à quelques jobs ou des voyages pour les plus riches, après avoir rompu avec une continuité en mode automatique, il me semble que les choix sont plus pertinents et les études mieux appréhendées comme un apprentissage et non une suite de jalons qui les sanctionnent.