1962-1961:2-1 passages
Par Anna Fedorovna le dimanche 24 décembre 2006, 12:49 - Mes petits cailloux - Lien permanent
Elles disent.
Au début, avant Massy-Palaiseau, où nous ne sommes restées que quelques mois, on a habité toutes les trois dans un tout petit studio dans le 13e. Ton berceau était au bout du lit où nous dormions toutes les deux. Le matin quand tu te réveillais et que tu as été assez grande pour le faire, tu passais de ton lit au nôtre. Tu étais très sage, tu as fait tes nuits en rentrant de la maternité, ne pleurant quasiment jamais. Par contre tu nous inquiétais, tu n'as commencé à parler qu'après deux ans bien tassés. Pas le moindre mot d'enfant auparavant, pas même « papa » ou « maman ». (Cassandre dit : si si, souviens-toi elle a dit un mot un seul jusqu'à deux ans « ca-handre », mon prénom.) La directrice de la crèche se faisait du souci aussi à ce sujet. Un jour elle nous a donné le numéro de téléphone d'un spécialiste. Tu as commencé à parler le lendemain ou le surlendemain. Incroyable.
Je me souviens.
De la crèche. Faux souvenir. Mon deuxième lycée en était tout proche et nous sommes revenues habiter quelque temps dans le treizième arrondissement quand j'avais entre 14 et 18 ans. J'y suis revenue depuis 2002. J'habite pratiquement en face. A l'époque du lycée, j'y suis allée, la directrice était la même, elle se souvenait de moi à cause de cette inquiétude qu'elle avait partagée. Il m'a semblé que je reconnaissais les lieux mais j'avais tellement envie de les reconnaître que je ne sais pas si c'est vrai.
Je me souviens que le passage d'un lit à l'autre s'est fait dans l'autre sens pendant des années avec ma sœur jusqu'à son mariage. Dès que notre mère était couchée elle venait me rejoindre dans mon lit-bateau et tâchait de se réveiller avant Maman pour retourner dans sa chambre. Quand elle est partie, j'ai eu beaucoup de mal à m'habituer à dormir seule.
1988, Maman m'aide à envoyer les faire-part de naissance de mon aîné. Elle dit : En 1962, ta grand-mère Louise était à l'hôpital, elle savait qu'elle allait mourir, un cancer. De l'hôpital elle a téléphoné à la femme de ton père. C'est elle qui lui a appris ton existence. Alors Aïda a voulu te rencontrer. J'ai dit : « Pas sans moi. » Alors ça ne s'est pas fait. Vers 1974-1975, avec Claire,[1] on nous avait demandé de faire des interview dans la rue pour un exposé. Alors on a eu l'idée de choisir comme thème la fidélité et d'aller interwiever « par hasard » la femme de mon père qui tenait une boutique d'accessoires de mode, je savais où. Je n'ai jamais osé ni même jamais osé non plus me poster à un coin de rue pour la voir sortir et connaître son visage. Je ne sais pas à quoi elle ressemblait.
Notes
[1] Claire, c'était bien avec toi ?
Commentaires
wow... et of course le post sur la naissance va tomber pile-poil le jour de noël ou on fête parait-il une naissance. Pourquoi on fête une naissance en consommant des cadavres d'animaux, ça reste un mystère pour moi mais bon...
Ce n’est peut-être pas un si faux souvenir que ça. Il y a trois ans parce qu’elle était sans véhicule, j’accompagnais une amie dans la lointaine banlieue où j’avais passé mes 4 premières années (1). J’avais vaguement le souvenir d’être retourné en ces lieux deux fois pendant mon enfance, à l’invitation d’une amie que ma mère avait quelque temps après notre départ avant de l’oublier. J’ai été fort étonnée d’être capable de tout retrouver. Certes, la partie centre ville n’avait que peu changé, c’étaient les collines aux arrières, qui de vergers étaient passées au statut de zone pavillonnaire chic. Entre autre le chemin de l’école maternelle, et l’école elle-même, telle que dans mes souvenirs mais en plus petit (de même que le trajet pour s’y rendre et l’inclinaison de la pente qu’il nous fallait dans un sens descendre dans l’autre péniblement remonter, plus douce dans ma réalité d’adulte que dans mes souvenirs de petite). J’étais également capable d’aller à la pharmacie, la poste et au cabinet du médecin (il faut dire qu’enfant j’étais sans cesse malade). Donc on se souvient parfois bien au-delà de ce qu’on croît.
Belle tentative de la grand-mère pour tenter de faire quelque chose pendant qu’elle le pouvait encore. C’est une question qui me tracasse souvent ça, ne devrait-on pas intervenir plus souvent si l’on se trouve à détenir des informations qui sont cruciales pour les autres et qu’eux-mêmes peut-être ignorent et sont déjà sans le savoir en danger, ou du moins pourraient avoir une chance de s’en sortir si on les aidait à établir le lien (2). Ou risque-t-on au contraire de déclencher pire catastrophe qu’une situation existante déjà difficile ? (bon, j’arrête là sinon je vais reparler du film Smoking / No smoking et ça va repartir pour un tour .
(1) tu me diras entre 2 et 4 ans d’âge il y a tout un monde. (2) Je suis persuadée que cette femme aurait eu tout à gagner à te connaître. Cela dit, il y aurait probablement eu d’autres complications. Les relations humaines sont si complexes (vive les maths modernes, les quarts de pommes dauphines ou pas … et les problèmes de robinets :-) !)
Somebaudy :Et toutes ces bûches qu'on martyrise en les mettant au frigo et en leur plantant des nains en plastique dans le dos avant de les passer à la tronçonneuse et de les servir en rondelles sur des assiettes lisérées dorées, tu y as pensé, hein ?
Mmmmh, les cadavres d'animaux morts qu'on a tués ... Qu'est-ce que c'est bon !
Ma kozlika préférée
Le jour où mon Axelle m'a trouvée en larmes devant "maudit caprice" elle a voulu lire ton blog, pour voir. Et elle est tombée fan. Elle n'a pas encore tout lu, parce qu'elle fait tous les liens, tous les commentaires, mais elle ne devrait pas tarder. Ce soir, devant notre repas de réveillon, elle m'a demandé de te signaler que bon oui, c'est bien beau d'avoir été élevée par une mère communiste et féministe, mais que c'est bien plus dur quand on est élevée par une mère communiste et féministe 20 ans après que la mode soit passée. "Mais" ai-je répondu interloquée, "je ne suis ni communiste ni féministe !" Et la chair de ma chair a éclaté de rire. On se connait donc si mal ? Famille je vous hait !