Père-mêle
Par Kozlika le mardi 19 mai 2009, 20:10 - Lien permanent
L’homme de Wuppertal et moi on aime bien lire les blogs ensemble, chacun avec son doudou ordinateur sur les genoux[1]. Le billet de Samantdi, « Ajouter les nôtres aux miens », je l’ai lu quelques heures avant lui. Le soir, je l’ai vu afficher la page, puis au bout de quelques secondes marmonner : « la petite-fille de mon père ? ah oui sa nièce ». J’ai bien vu qu’il en était tout perplexe, de cette curieuse formulation.
Je ne la trouve pas curieuse moi, parce qu’en fait j’ai toujours parlé de ces gens au loin qui partageaient la vie de mon père comme de « la famille de mon père », il ne me serait pas venu à l’idée de la dire pour mienne. S’il avait eu une autre fille, je ne sais pas si j’aurais parlé d’elle en disant la fille de mon père, mais ce qui est sûr c’est que je disais les neveux de mon père et non mes cousins.
Mais voilà que Kouzin m’écrit et il conclut son premier mail par « après tout nous sommes cousins ! », et puis d’autres mails, d’autres phrases plus touchantes encore qui me font entrer dans le cercle de famille, des petits cailloux qu’il glisse dans les interstices des miens. Voilà qu’un petit-neveu de mon père est devenu un mien cousin. Et c’est quelque chose que le dedans d’une tête, parce que si Kouzin est assurément mon cousin, sa famille est toujours la famille de mon père, sauf que c’est aussi désormais la famille de mon cousin. Le lien familial ne se construit pas par partage génétique mais par l’assemblage de petits cailloux qui se mêlent les uns aux autres. Ou le lait. Un jour je vous parlerai de Luciano Pavarotti et Mirella Freni.
Kouzin sait déjà qu’il a une cybercousine ; il faudra que je lui dise aussi que Raymond Queneau est son grand-oncle du jour d’après.
Il faut que je réfléchisse aussi à la question qu’a suscitée une suggestion de l’homme de Wuppertal, entre le premier et le deuxième mail de Kouzin, quand je pensais que peut-être il allait changer d’avis et que je n’aurais plus jamais de nouvelles. « Il n’est pas temps de t’affoler. Mais s’il ne répond vraiment pas d’ici mettons une semaine, envoie-lui un mail avec juste les questions les plus importantes que tu avais à poser, ce qu’il te tient vraiment à cœur de savoir. »
Savoir si elle est encore vivante, ça fastoche (et c’est oui et elle a 101 ans, je suis bien contente !). Mais sinon ? Ai-je vraiment des questions importantes à poser ? Je n’en suis pas sûre du tout au bout du compte ; à lire Kouzin je m’aperçois que sans doute n’en ai-je pas tant que ça. Juste…
…des petits cailloux à placer dans les interstices. Il a vraiment existé. Et du coup toi aussi, tu es. Vivante.
Notes
[1] N’est-ce pas Chiboum moqueuse ?
Commentaires
Je suis issue d'une famille "normalement"composée.! C'est quoi d'ailleurs?
Mon frère et moi parlons régulièrement de "sa"mère et je lui conte les histoires de "ma mère" tant elle est différente entre nous deux.
Donc la famille de" ton père" je comprends parfaitement.
Je vous souhaite kousin et toi de découvrirent à travers les mails et conversations votre "parenté" indéfectible,acquise,et génétique.
C'est étonnant ce que l'on peut trouver!!!!!
Moi moqueuse ? Ca se saurait, voyons !!! (Mais c'est très souvent une marque d'affection, en même temps !).
Je suis émerveillée et ravie pour toi de ce lien qui se tisse.
J'ai rencontré sur le tard un cousin de mon âge, pas du tout par les mêmes cheminements, simplement nous ne sommes pas germains mais issus d'issus d'issus et la vie a fait qu'on s'est rencontrés à l'enterrement de ma grand-mère, il y a quelques années.
J'en ai tiré une sorte de ravissement de me sentir si évidemment "en famille" avec quelqu'un que je n'avais jamais vu. Alors forcément, je transpose, et j'espère que tu t'empliras toi aussi des joies de ces petites familiarités tissées pourtant de si loin. En plus de tout le reste.
Elle est toujours vivante et elle a 101 ans... Donc, c'était elle, la très vieille dame à la fenêtre ?
Ça fiche le vertige, cette rencontre avec Kouzin !
Je ne sais pas pour la dame à sa fenêtre (irrésistiblement et depuis ce jour, dès que je mentionne cet épisode, je fredonne intérieurement la chanson "File la laine" ; elle n'avait pourtant pas l'air triste du tout).
Oui toi aussi tu es vivante, et on en est bien contents :o)
Je t'espère encore plein de découvertes dans ce nouveau lien de kousinage.
Je suis très heureuse que ce billet soit le premier de mon tout nouvel agrégateur (merci HdW ;-) ) de mon tout nouvel ordinateur que j'ai. Il va bien avec un commencement et donne envie d'avenir (non, non je ne le dis pas comme les policitien(ne)s).
Pour avoir un peu trop longuement et bien malgré moi réfléchi au sujet, je me dis que les questions revêtent une plus grande importance quand on suppose qu'on ne pourra jamais accéder à une voie/voix qui nous aiderait à les résoudre. A partir du moment où l'on sait que l'information est désormais en accès, elles deviennent moins cruciales. C'est un peu comme si avoir des papiers officiels devenait soudain moins important pour séjourner dans notre pays de vie, dés lors que disparaissent les lois qui font que n'en avoir pas nous tient écartés d'une existence normale voire menacés de banissement.
Je ressens quelque chose de cet ordre très fort depuis un mois.
On s'aperçoit aussi, sans doute (?) assez souvent, qu'on possédait la plupart des réponses, manquaient surtout une ou des clefs d'accès. Une fois ce dernier déverrouillé, les révélations peuvent être intérieures, sans apport de nouveaux éléments. Il peut s'agir de choses jusqu'alors éparses qu'on sait désormais relier et qui ainsi font sens.
Ça ne console pas, je sais, mais le côté "famille de" on peut l'éprouver même dans un cas absolument classique en étant l'enfant de ses parents biologiques qui vivent sous le même toit et le même toit que soi mais dont on se sent étrangers.
Et je suis très heureuse que ton cousin semble être de la trempe des défaiseurs de frontières.
Vraiment ton Cousin est formidable !
Une étincelle de vie.
tu as changé le titre du billet ou c'est moi qui jusqu'ici avais lu trop vite ?
Nan m'dame, c'était ce titre-là dès le départ :-)