La femme n’a pas le pied métropolitain. Elle s’obstine néanmoins à tenter de camper sur ses deux jambes sans se tenir à la barre ni à la poignée de la porte. Elle a posé un cabas de toile plastifiée à l’enseigne d’un magasin citadin à ses pieds, après bien des hésitations toutefois.

Trois ou quatre fois entre les deux premières stations elle a trébuché et s’est cognée à moi, qui suis assise sur un strapontin. Trois ou quatre fois je l’ai aidée à se redresser, ne recueillant qu’une mine pincée en guise de remerciement. L’homme qui se tient debout et s’est écarté prestement à chacun de ses chancèlements échange avec moi un soupir exaspéré.

Le manège recommence à la station d’après. N’y tenant plus il lui demande :

« Mais pourquoi ne vous tenez-vous pas à la barre ?
- Vous avez entendu parler de la grippe A ?, rétorque sèchement Mrs. Culbuto. Non merci ! »

Voilà qui nous laisse sans voix et nous fait sourire de concert.

Glacière. Comme d’habitude, un fort flux montant et descendant. Une place se libère sur le strapontin en face du mien. Mrs. Culbuto se penche pour attraper son cabas rose à fleurs, dans l’intention manifeste de se saisir de la place qui vient de se libérer. Le gars se faufile vivement entre la dame et l’objet de son désir et se vautre tranquillement sur ledit strapontin.

« Oh ! »

Mrs. Grippe-A-No-Pasaran n’a pu retenir un cri de dépit et de réprobation et foudroie mon nouvel ami du regard. Angélique il lui dédie un large sourire :

« Hors de question que je vous laisse vous assoir ! Vous n’imaginez même pas le nombre de virus qui traînent sur les sièges. »

Cette fois c’est la franche rigolade autour de nous. Pour d’obscures raisons, Mrs Mouchée nous quittera à la station suivante.