C’est la période de la galette des rois, ce qui comme chaque année me confronte à de douloureux cas de conscience.

J’adore ça. Attention, je parle de la vraie. Il n’est pas question ici de l’infâme brioche anisée que les gens du Midi, feignasses abruties par le soleil et trop incompétents pour réussir une pâte feuilletée digne de ce nom prétendent nous faire avaler. Je ne parle pas non plus du pithivier, certes mets mangeable, mais dont la proportion de frangipane et de pâte est très mal équilibrée. J’aime, donc, la galette des rois.

Mais la coutume de la galette des rois présente des aspects que ma morale réprouve. Premièrement, je suis athée. Or la galette des rois célèbre un événement religieux. Ça me gêne beaucoup, vous le pensez bien. Deuxièmement, je suis républicaine. Fêter des rois est pour moi douloureux, un reniement de mes idéaux difficile à supporter. Troisièmement, je suis révolutionnaire, c’est-à-dire que je conchie les traditions et l’oppression du peuple qui en découle. Quatrièmement, je suis moderne et cette grosse galette à l’heure de Twitter, je trouve ça totalement has been.

Quand on parle de galette des rois, à quoi s’attend-on ? Par manque d’imagination et, il faut bien le dire, par un conditionnement dont nous sommes victimes depuis des siècles, on pense à ça[1] :

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Cela manque affreusement d’esprit créatif, de dynamisme, de liens sociaux, de modernité. Pour notre petit déjeuner en amoureux ce matin, j’ai créé une recette – que je vous offre bien volontiers en (Creative Commons, paternité, pas d’utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l’identique).

Je l’ai appelée la Galette républicaine 2.0. Si vous suivez scrupuleusement mes instructions, vous pourrez présenter ceci à vos invités[2] :

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Ma recette présente de nombreuses qualités, outre son anticonformisme patent. Je citerai la possibilité de ne manger que la quantité qui vous intéresse en picorant morceau par morceau ; celle de ne manger que la frangipane et/ou que la pâte feuilletée ; en famille elle vous permettra de maintenir le plus jeune sous la table tout le temps de la dégustation car il lui faudra pour chaque fragment déterminer pour qui celui-là. Je ne peux les lister tous car ils sont innombrables. Notez que cette présentation est particulièrement bien adaptée à un public de twitterreux : les fragments n’excèderont jamais 140 grammes, le plus souvent ils pèseront même beaucoup moins.

Réalisation :

Faites l’acquisition chez P*card de l’une de leurs traditionnelles galettes crues prêtes à cuire[3]. C’est tout l’art du détournement inventif en cuisine qui va jouer son plein rôle.

Suivez toutes les instructions portées au dos de la boîte, sauf UNE, pri-mor-diale : ne mettez PAS la galette sur une feuille de cuisson et encore moins sur une plaque. Glissez-la directement sur la grille, sans plus de formalités. Attendez les 45 minutes préconisées sur la recette et partez faire autre chose. Par exemple retravaillez vos photos de la veille.

Lorsque le four annonce que le temps de cuisson est atteint, ouvrez-le : si tout va bien, voici l’aspect de notre succulente galette républicaine avant de la sortir du four :

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Notez la séparation qui s’est parfaitement effectuée entre la pâte feuilletée et la frangipane (photo ci-dessus) et la beauté ondulante et stalagtante de ladite pâte feuilletée (photo ci-dessous).

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Magnifique non ? Il ne vous reste plus qu’à vous saisir d’une spatule et de rassembler les éclats dans un joli plat de service. Ne vous inquiétez pas pour les miettes qui sont restées attachées à la sole ou à la grille ; la quantité de matière grasse vous garantit que pratiquement rien n’aura attaché, en tout cas rien qui vous prenne plus d’une heure à nettoyer le four.

Merci qui ?

Notes

[1] Je ne parle évidemment pas des gens du Midi qui ne pensent à rien.

[2] A partir de là vous pouvez cliquer sur les images pour les voir en plus grand.

[3] La première photo est d’ailleurs issue de chez eux.