Les médias (Le Nouvel observateur, Europe 1, Yahoo news, Pointblog, Le Figaro, Le Midi Libre) commencent à s'en faire l'écho : un proviseur vient d'être révoqué parce qu'en évoquant sur son blog - bien que sous pseudonyme - son métier, sa vie privée, son homosexualité, et en y exposant des photos qualifiées de pornographiques il aurait manqué à son devoir de réserve.

Révoqué, c'est-à-dire qu'il n'aura désormais accès à aucun poste de la fonction publique, qu'il doit quitter immédiatement son logement de fonction, qu'à compter de la date à laquelle la sanction a été prononcée il n'a plus de salaire ni ne peut prétendre aux Assedic puisqu'il était auparavant fonctionnaire. C'est la plus forte des sanctions que puisse subir un fonctionnaire. Je crois savoir qu'elle n'est prononcée que très rarement, et moins encore lorsque le fonctionnaire n'a fait l'objet d'aucune condamnation pénale en parallèle.

J'étais lectrice du blog de ce proviseur depuis plus d'un an lorsqu'il l'a fermé dès qu'il a appris qu'il était suspendu, le 19 octobre dernier. Sans être d'une pruderie excessive, je suis plutôt (très) pudique, pourtant jamais aucun billet - et je les lisais tous, même si je n'y portais pas le même intérêt en fonction du sujet abordé -, jamais aucune photo ne m'a peu ou prou choquée. Rien dans ce blog qui me ferait redouter que mes enfants tombent dessus. Les photos en question étaient de celles qu'on voit dans tous les magazines, typiquement les publicités pour telle ou telle marque de caleçon, la belle affaire ! Quant aux textes ils étaient d'une grande retenue, donnant de cet homme l'image d'une personne sensible et attentive aux autres, qu'il s'agisse de ceux évoquant sa vie affective ou de ceux concernant sa vie professionnelle. Discret, il n'a non plus jamais donné ni son nom ni le nom de l'établissement où il exerçait.

Mère de deux adolescents, j'ai souvent pensé que j'aimerais que mes enfants aient la chance d'avoir un tel homme, chez lequel la vocation de pédagogue ne laisse aucun doute, pour chef d'établissement. On ne peut que regretter que l'institution Education nationale focalise sur ce blog personnel d'un proviseur (auquel rien de professionnel n'est reproché) alors qu'elle devrait s'employer à régler les vraies difficultés dans lesquelles elle laisse les personnels enseignants se débrouiller (on se souviendra des vains et nombreux appels à l'aide de cette prof du lycée d'Etampes).

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Je ne connais pas les règlements quant au devoir de réserve dans la fonction publique, admettons qu'il les ait outrepassés (?). Mais si c'était le cas, en quoi cela méritait-il une sanction aussi dure ? Aussi définitive ? La disproportion de la "faute" et de la sanction est criante d'injustice, la prétendue "pornographie" un mensonge. J'aimerais que ce proviseur remette son blog en ligne (encore qu'archives.org et le cache de Google y donnent encore accès) afin que chacun puisse se rendre compte du ridicule de ce terme de pornographie dont je ne peux hélas que penser qu'il se rapporte en réalité à l'homosexualité de l'auteur.

J'aimerais que ce proviseur s'exprime publiquement maintenant qu'une partie de la presse est allée jusqu'à révéler son nom et sa ville et que nous puissions le soutenir contre une décision essentiellement guidée par les préjugés, le repli sur soi d'une institution dont pourtant il contribuait à réhausser l'image, et sans doute également guidée pour une bonne part par la paranoïa suscitée par les blogs, paranoïa dont déjà des élèves ont été exagérément victimes.


Edit du 19 janvier 2006 :

  • Laurent Gloaguen recense les billets qui en parlent. Ecrivez-lui (laurent AT embruns.net) pour lui en signaler de nouveaux.
  • Une pétition a été lancée par des parents d'anciens élèves et des anciens élèves de Garfieldd. Elle regroupe ce jour environ 800 signatures.