Le bonheur vient-il de ces deux mots : la bonne heure ? Cela voudrait-il dire qu'il vient toujours à la bonne heure ? Le bonheur est-il ponctuel ? Et si oui, pourquoi n'existe-t-il pas un indicateur des heures du Bonheur comme pour les Chemins de Fer ? Sont en grève les imprimeurs du Bonheur ? Vous comprenez, si on me disait tel jour, à telle heure, le bonheur arrivera dans votre gare à 14h42, ça m'aiderait. Notez que 21h27 aussi, n'est-ce pas. C'est juste que j'aimerais prévoir, me préparer, me faire toute belle pour son arrivée.

Et puis j'aimerais ne plus attendre trop longtemps sur le quai aussi. J'ai vite froid, vous savez, et j'ai passé des heures et des jours et maintenant des années à guetter au plus loin que je pouvais son arrivée, le cœur battant la chamade. Est-ce la bonne heure, enfin ? Le prochain bonheur est-il pour moi ? Me laissera-t-on monter pour qu'il m'emporte là-bas au loin très loin d'ici ? J'en ai croisé qui filaient vite, on y avait l'air bien, à travers les vitres filtrait une lumière douce, des rideaux chamarrés et des gens souriants.

Ou dites-moi combien de sabliers, j'en ai eu sept, très jolis. Combien de fois dois-je les retourner ? C'est que tout est si gris ici, et le temps est si long. Vous savez, je ne suis pas exigeante, je voudrais juste connaître l'heure, juste prévoir et me faire belle. Et puis je ne demande pas grand chose, seulement l'aller. Pour le retour, c'est pas la peine.