Dans le Gers, il est de longue tradition depuis des générations et des générations que les femmes soient sages, intelligentes et belles. C'est pourquoi je fus flattée hier soir d'avoir l'honneur et le privilège de dîner avec deux d'entre elles.

Nous en étions toutes les trois à l'apéritif quand – avec l'esprit scientifique que le gros manseng donne aux femmes – nous abordâmes l'intarissable et passionnant sujet des hommes et de leurs relations avec les femmes. De nos rapports d'expérience il ressortit assez rapidement que l'ex de Machin (qui est si gentil) et l'ex de Truc (qui l'est tout autant) ainsi que l'ex de Bidule (encore plus), et tant d'autres de notre connaissance dotées de compagnons gentils étaient toutes des chieuses hystériques. Gravement. Et – avec la gravité que confère aux femmes le gros manseng –, nous constatâmes que de nos relevés et prélèvements en tous points géographiques et tous milieux sociaux découlait une loi scientifique dont la découverte devrait nous apporter le prix Nobel. En effet, il nous apparut clairement – grâce à l'esprit de déduction que rehausse le gros manseng chez les femmes – que les femmes chiantes et hystériques faisaient main basse sur tous les hommes gentils.

Nos travaux – et la bouteille de gros manseng – achevés, nous nous séparâmes dans l'apaisement que procure le gros manseng l'accomplissement de toute œuvre de l'esprit.

Allez savoir pourquoi, je me suis endormie très facilement.

Mais soudain, au beau milieu de la nuit, je me réveillai en sursaut, couverte de sueurs froides, le souffle haletant, gémissante. Et me dressant sur mon séant, j'arrivai enfin à ajouter deux et deux (verres de gros manseng) et m'écriai sauvagement dans la nuit :

JE NE SUIS PAS UNE CHIEUSE HYSTÉRIQUE !